Scooters ML : envol et vols
mercredi 22 août 2007 , par
Besoin de mobilité, deux roues d’Asie accessibles, il n’en fallait pas plus pour favoriser l’essor du deux roues au Mali. Qui s’est accompagné de l’essor de leurs vols. D’où une nouvelle profession : gardien parking deux roues. M KEITA dans Essor.gov nous détaille cette profession et c’est la vie de tout un pays qui nous est révélée.
Depuis quelques années, garder les motos est devenu une activité à temps plein pour de nombreux jeunes à Bamako. Son essor a été favorisé par la multiplication des vols de moto, et surtout par la déferlante de ces engins importés d’Asie. Des parkings pour motos s’ouvrent ainsi chaque jour. L’installation de ces parkings dans les services et structures publiques a un double avantage.
D’un côté, le propriétaire d’une moto peut garer son engin en toute sécurité. De l’autre, l’activité crée des emplois et est source de revenu pour de nombreux jeunes. Tous les promoteurs de parking se frottent effectivement les mains.
Le parking pour motos de l’ex-Faculté des sciences juridiques et économiques (FSJE) compte parmi les plus grands de la capitale. En y arrivant, l’on a l’impression de se retrouver dans un vaste marché à motos. Les engins se comptent par centaines sous un grand hangar aménagé il y a une dizaine d’années.
Pendant l’année scolaire, les motocyclistes qui viennent se garer et ceux qui s’en vont s’entrecroisent à l’entrée du parking dans un ballet intense qui dure toute la journée. Et pendant tout ce temps, le gérant du parking, Dramane Goïta, ne relâche pas sa vigilance avec l’un autre jeune homme qui fait office d’assistant.
Dramane Goïta surveille de près tous les mouvements des uns et des autres. Il aurait tort de ne pas le faire car en la matière, de mauvaises surprises peuvent survenir. Les voleurs ne manquent, en effet, pas d’audace et sont bien capables de tenter d’enlever une moto. A ce propos, le gérant du parking de l’ex-FSJE témoigne : « Je gère ce parking depuis plus de 15 ans. J’ai vu un jour un voleur partir avec une moto sans pouvoir rien faire. En fait, il avait passé un bon moment dans le parking avec les étudiants. Il a endormi la conscience de tout le monde en se faisant oublier. Il a ensuite pris une moto pour mettre immédiatement les gaz. Nous avons été obligés d’acheter une autre moto pour le propriétaire de l’engin volé. Pendant l’année scolaire, il y a trop de motos, la vigilance doit donc être de mise"
Peu importe la durée de stationnement
Au parking de la FSJE, le stationnement est facturé à 50 Fcfa (0,076€). Les conditions de stationnement sont précises et connues de tous les étudiants. "Celui qui gare sa moto paie 50 Fcfa lorsqu’il revient l’enlever. Peu importe la durée de stationnement. Chaque fois que le client gare sa moto, il règle 50 Fcfa. S’il le fait 100 fois par jour, il paiera autant de fois 50 F", précise Dramane Goïta.
Les mêmes conditions prévalent à l’hôpital Gabriel où le stationnement coûte également 50 Fcfa. Même ceux qui sont au chevet d’un malade et qui font des va-et-vient incessants à longueur de la journée doivent payer chaque fois qu’ils reviennent au parking.
Le parking du Centre international des conférences est l’un des plus fréquentés. Ici, le stationnement est facturé à 100 Fcfa. Le flux intense de motocyclistes tient à la multitude de manifestations qu’abrite le site. "Notre recette journalière atteint régulièrement 6000 Fcfa(9,14€). On double cette somme quand il y a de grandes rencontres comme les meetings des partis politiques et les manifestations culturelles", indique Belco Diallo, le gérant du parking.
Diallo estime avoir fait un bon choix en s’installant dans le créneau. "Depuis que je suis arrivé à Bamako en provenance de mon village, je n’ai pas pratiqué deux métiers. J’ai choisi d’emblée cette activité", poursuit Belco Diallo qui ne travaille pas seul. Il est assisté par Broulaye Sidibé.
Les deux jeunes gens ont demandé l’autorisation aux responsables du Centre d’installer un parking voilà quatre ans déjà. Le business semble bien marcher. Diallo âgé de 38 ans, a deux épouses et cinq enfants. Il assure qu’il arrive à tirer son épingle du jeu grâce au parking. "Je ne me plains pas vraiment. Ce que je gagne me permet de prendre en charge les besoins de ma famille", explique-t-il, avant de préciser que son installation protège bien les motos. "Depuis que nous avons commencé, aucun cas de vol n’a été enregistré. Cela constitue réellement un motif de satisfaction pour moi", se réjouit Belco Diallo.
Depuis 20 ans
Le parking paie 3000 Fcfa (4,57€) de taxes à la mairie de la Commune III. Le gérant assure s’acquitter convenablement de cette obligation. "Par contre, précise-t-il aussitôt, je ne verse pas un centime à la direction du Centre international des conférences".
Des problèmes avec les clients ? "Pas du tout, répond Belco Diallo. Je m’entends bien avec les motocyclistes. Et quand je me rends compte qu’un client n’a pas d’argent, je le laisse partir sans payer".
À quelques encablures de là, le parking de la BDM. Tarif : 50 Fcfa. Le patron qui s’appelle Adama Diaou, a recruté deux employés. Diaou est surveillant de motos depuis 20 ans. "J’ai commencé ce métier en 1986. A l’époque je travaillais avec mon grand frère qui gérait le parking du Palais de la culture", révèle-t-il.
"A l’époque, il y avait très peu de parkings pour motos à Bamako. On en trouvait rarement dans les services publics ou privés. Les parkings étaient essentiellement installés au niveau des salles de spectacle et de cinéma ou devant les stades", se souvient Adama Diaou qui a installé son propre parking à la BDM en 1991. À l’époque, plusieurs cas de vol de motos appartenant à des clients de l’établissement avaient défrayé la chronique locale.
"Il était devenu nécessaire de créer un parking payant sécurisé. J’ai fait une demande dans ce sens aux responsables de la banque", raconte-t-il en se souvenant que les débuts n’avaient pas été du tout facile. "Certains clients refusaient de payer le stationnement, estimant qu’ils se trouvaient dans un service public.
Un jour, un visiteur m’a assené un coup poing au visage quand je lui ai réclamé le prix du stationnement", précise-t-il. Beaucoup pensaient alors que le parking de la banque ne pouvait être payant. "Après ils ont compris que notre service était trop utile pour être gratuit", note Diaou qui souligne que l’installation de son parking à la BDM a permis de stopper d’un coup les vols de motos. "Dieu merci, depuis que je suis venu ici, on n’a pas entendu parler de vol de moto", constate-t-il.
Quotidiennement, Adama Diaou réalise en moyenne 5000 Fcfa (7,62€) de recettes. Ses deux employés perçoivent 1000 Fcfa (1,52€) chacun et ont droit à un repas et au prix du transport.
"Comme on le dit, il n’y a pas de sot métier. Je ne me plains pas vraiment d’être le gérant d’un parking", dit-il. Diaou avoue qu’il aimerait doubler les frais de stationnement en les portant à 100 Fcfa. "Mais je sais que cela ne va pas plaire aux clients", prévoit-il.
Les mauvais payeurs
Il faut dire que les relations entre les gérants des parkings et les usagers ne sont pas toujours sans histoire. Ainsi, le promoteur du parking de la FSJE, Dramane Goïta, assure avoir affaire à des clients non payeurs tous les jours. "Il y a des motocyclistes qui refusent de payer sous prétexte qu’ils n’ont pas d’argent. Quand ils insistent, je les laisse partir pour ne pas provoquer une bagarre pour une somme aussi modique".
Nous avons d’ailleurs assisté à une dispute entre Goïta et un usager, apparemment un simple visiteur à la FSJE. Il a refusé de payer et le gérant du parking bien que furieux, s’est résolu à le laisser partir.
Quelques minutes plus tard, un autre client était venu poser un autre problème. Il avait perdu son ticket de stationnement mais tenait à enlever sa moto. Le gérant exigera qu’il montre sa carte d’identité et les papiers de sa moto.
"C’est toujours comme ça quand le motocycliste perd son ticket, on lui demande de nous montrer les pièces de la moto et sa carte d’identité", explique Goïta. C’est ainsi que ça se passe aussi dans la plupart des parkings. "Tous les gérants de parking le font. Il s’agit d’une mesure de prudence", déclare Dramane Koïta qui se considère comme le mentor de nombre de ses collègues. "J’ai formé beaucoup d’entre eux. Et jusqu’à présent, il viennent chaque fois prendre de conseils chez moi", assure-t-il avec fierté en indiquant par ailleurs qu’il paie annuellement 14 000 Fcfa (21,33€) aux Impôts.
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